retour accueil

 

 


Pour débuter cette ascendance, je ne disposais que de quelques éléments :
  • l'acte de décès de Marie Calixte Alexandrine Suzanne BOYE, veuve d’Henri Pierre Marie Louis JAMARD, le 30 avril 1970 à Angers.
  • des propos recueillis : "Jean Alexandre BOYE serait décédé lors de l’éruption du Mont Pelé en 1902."

L'acte de décès nous apprend que Marie Calixte BOYE naît le quatorze octobre 1876 à Fort-de-France et qu'elle est la fille de Jean Alexandre BOYE et de Marie Julie Camille dite Eudora IHLER de St HILAIRE.

 

Son acte de naissance du 14-10-1876 à Fort-de-France nous apporte quelques renseignements supplémentaires sur ses parents :
  • Son père, Jean Alexandre Boye, est alors âgé de 44 ans, soit né vers 1832. Il est commerçant et propriétaire rue St Louis à Fort-de-France.
  • Sa mère, Marie Julie Camille Ihler de St Hilaire dite Eudora est âgée de vingt-six ans, soit née vers 1850.


rue Saint-Louis :
Appelée encore rue Saint-Louis malgré son nom actuel, la rue Antoine Siger fait partie des premières rues commerçantes dont l’activité commence avec les métiers du tissu et les modistes.

cliquer sur l'image pour l'agrandir

Quant aux propos recueillis, après une recherche sur Internet, j'ai pu trouver sur le site Généalogie et Histoire de la Caraïbe une liste des personnes disparues et secourues lors de la catastrophe du Mont Pelé.


Un dossier au nom d'Alexandre BOYE existe bien et il concerne sa veuve, Eudora SAINT-HILAIRE.

liste de secourus du Mont Pelé

C'est donc armé de ces quelques éléments que je me suis rendu au CAOM.

 

 

 

 

décès de Marie Calixte Alexandrine BOYE
voir l'acte

 

Naissance de Marie Calixte Alexandrine BOYE
voir l'acte

 

 

 

Saint-Pierre : l'éruption du Mont-Pelé
plus d'informations sur le site Généalogie et Histoire de la Caraïbe
"Le 8 mai 1902, une nuée ardente échappée du cratère a détruit complètement la ville de Saint-Pierre faisant environ 29 000 morts. [...] Aujourd'hui reconstruite, Saint-Pierre est une petite cité de 5000 habitants. Avant l'éruption, la ville était la capitale commerciale de la Martinique."

"Un aperçu sur le fonctionnement et les réalisations du comité d’assistance et de secours est cependant utile. Le comité officiel d’assistance et de secours se réunit à Paris, sous l’égide du ministre des Colonies dès le 12 mai, tandis qu’à l’annonce de la catastrophe, une cellule de crise, le Bureau spécial de la Martinique, est créée au ministère.
Sur place, sous la présidence de Victor Sévère, Maire de Fort-de-France, une commission locale se réunit le même jour, ayant pour attribution de proposer les mesures au soulagement des sinistrés et la répartition des secours, d’abord sous forme d’une distribution de vivres au jour le jour.
Le comité parisien se voit confier la répartition définitive d’aides, grâce aux sommes collectées dans le monde entier qui lui sont remises et à l’argent débloqué par le gouvernement. Il fonctionnera jusqu’en 1909, après quoi, un comité de patronage assurera seul le suivi social des allocataires, tandis que la direction du Contrôle des Colonies veille à la bonne gestion des fonds. Ce sont au total 9,358 MF qui sont collectés dans le monde en faveur des victimes de l’éruption de 1902. [...]
2157 dossiers reçoivent une suite favorable, pour un montant total de 1 607 115F."

 

 


Dossier de secours de "Eudora" Ihler de Saint-Hilaire,
Veuve Boye 1903 - 1906

Marie Calixte Suzanne BOYE --- Jean Alexandre BOYE
--- "Eudora" IHLER de St H.

Le dossier de secours va s'avérer d'une très grande richesse, plus pour l'histoire de la famille que pour les éléments purement généalogiques qu'il contient.

Ce dossier se compose d'échanges de courriers, de 1903 à 1906, entre "Eudora" Ihler, veuve Boye, sa fille Suzanne (Marie Calixte Boye), et le Ministère des Colonies.

Une lettre datée du 10 octobre 1903, a particulièrement attiré mon attention car "Eudora" y décrit précisément son histoire et celle de sa famille.

Dans cette lettre, Eudora nous apprend qu'elle s'est mariée en 1876 avec Jean Alexandre BOYE, que ce dernier est décédé en 1895, dans une maison de santé, et non au moment de l'éruption du Mont-Pelé. Elle nous retrace, de manière assez précise, la place que celui-ci, surnommé "papa Boye", tenait dans la société. Elle nous fait vivre également un moment de sa vie, délicat, nous parle de l'aide qu'elle a obtenue de cousins, les Beuvat de Virginy (ou Buvat de Virginy).
Le lien qui les unit à Eudora est le suivant :



Adrien Pierre Louis IHLER de St H. et Marie Françoise FRANCILLETTE
ont eu au moins 2 enfants :


Adrien et Louise CLAIRE
ont eu au moins 1 fille :


Marie Louise et ?
a eu au moins 1 fille :


Marie Julie Camille "Eudora" mariée avec Jean Alexandre BOYE


Marie Madeleine mariée avec Charles Gaston BUVAT de VIRGINY

Quatre jours plus tard, à la suite de ce courrier, le Ministère des Colonies lui alloue une pension mensuelle de 125 francs pour les quatre derniers mois de l'année. Cette pension remplace les 100 francs mensuels qu'Eudora percevait jusqu'alors.
Fin novembre, Suzanne Boye, fille d'Eudora, se rend au Ministère afin de solliciter une prolongation de la pension. Cependant, une lettre du 20 janvier 1904, écrite de la main de Suzanne, nous apprend que cette démarche n'a pas aboutie.


Cette échéance est arrivée mais malheureusement aucun emploi ne m’a été trouvé et, sauf l’abri, nous nous trouvons exactement dans la situation primitive et quand je dis l’abri je devrais dire momentanément car la propriétaire a bien voulu accepter un demi terme avec la promesse de le compléter à la fin du mois de janvier, promesse qui a été faite dans l’espoir d’avoir cette prolongation demandée.

Dans ce courrier, elle exprime les difficultés rencontrées mais aussi la maladie qui touche sa mère :


Ma mère souffre horriblement de rhumatisme et sa santé est fort chancelante.

La réponse du Ministère ne se fait pas attendre :


Séance du 26 janvier 1904
Sur la proposition de M. Lemoine, le Comité alloue à Madame Boye un dernier secours de 150F

Paris, le 26 janvier 1904
Le Président

Enfin, le 26 janvier 1906, Eudora Ihler fait une dernière tentative auprès du Ministère.

Cinq mois plus tard, le 1er juin 1906, la réponse est sans appel et la demande est rejetée :


Vve Boye
demande de recours
aucun motif nouveau

1 juin 1906
rejet

La fiche de renseignements, inclue au dossier, m'a permis de démarrer les recherches généalogiques. Cependant, nous le verrons par la suite, cette fiche est remplie d'erreurs concernant, notamment, la date de naissance d'Eudora, mais aussi l'âge présumé de sa fille Suzanne.
Pourquoi ces informations erronées ? S'agit-il d'une simple erreur administrative ? Eudora peut-elle ne pas connaître la date exacte de sa naissance ? Que s'est-il passé le 19 juillet 1857 ? Je n'ai pas, à ce jour, les réponses à ces questions mais je ne désespère pas !

 

 

 

le dossier complet de la demande de secours est consultable

courrier du 10 octobre 1903

Paris, 10 octobre 1903

A son Excellence
Monsieur le Ministre des Colonies

    Monsieur le Ministre

    J’ai l’honneur de solliciter de votre haute bienveillance une aide dans la misère où m’ont plongée successivement les évènements que je vous demande la permission de vous exposer. Née à la Martinique d’une famille riche (famille de Saint-Hilaire), je me marie en 1876 à monsieur Alexandre Boye qui était alors conseiller municipal de l’Île et qui comme négociant tout comme conseiller municipal et avant tout simple particulier avant d’être nommé, il contribua toujours de tous ses efforts au développement de l’île. Avant l’organisation du pays par la République, il créa des écoles dont il subventionna de ses propres deniers les instituteurs et institutrices.
    Le gouvernement de la troisième République lui envoya des félicitations de reconnaissance des services rendus. Nommé Maire, il décline cette offre mais ne s’occupe pas moins des misères à soulager, ce qui le fit surnommer « papa Boye » par les miséreux qui venaient nombreux et jamais en vain frapper à sa porte.
    Mon mari occupait une fort belle situation, tout semblait donc nous assurer un avenir heureux dans l’aisance. De notre union naquit une enfant que nous envoyâmes en France faire ses études.     En 1890, l’incendie de Fort de France détruisit toute la ville et en vingt quatre heures tous nos biens disparurent (…) (…) bijoux et du linge placés dans une villa que nous possédions alors en dehors de la ville.
    Avec l’aide du gouvernement, mon mari se remit courageusement à l’ouvrage mais au bout de quatre mois le cyclone vint de nouveau détruire ce qu’un latent optimisme avait créé et qui commençait à prospérer.
    A la suite de ces évènements douloureux, deux fois en un an nous revenant successivement, mon pauvre mari tomba malade et finit ses jours dans une maison de santé en 1895.
    Depuis ce temps, je vins à Paris avec ma fille qui naturellement dut travailler. Nous vécûmes de son maigre salaire et de quelques bijoux et linge que j’ai pu sauver ainsi que tout le reste du mobilier ne gardant comme linge que le plus strict nécessaire. A plusieurs reprises même des cousins au nombre de cinq se réunissaient pour nous venir en aide, nous envoyant par l’intermédiaire de monsieur Lapeyre de Saint-Pierre et qui a péri lors de la catastrophe, cousin de monsieur Déclemy habitant Saint- Maur, 17 rue Caroline, et commissionnaire. Ce dernier nous remettait ses subsides, variant entre 300 et 400 tous les trimestres. Ces cousins Beuvard de Virginy furent aussi victimes du (…) de sorte que depuis de longs mois que ma fille est sans travail ne recevant plus aucune aide, nous vivons dans la misère la plus noire.
    Recueillies par des amis obligeants mais pas fortunés qui d’ailleurs vont quitter Paris et forcément nous laisser par leur impuissance sans asile, c’est alors que ne sachant plus à qui m’adresser, j’ai songé à la grande sollicitude du gouvernement pour des colons malheureux, espérant que ma misère pourrait vous apitoyer, que les services autrefois rendus par mon mari seraient des titres pour accréditer ma requête auprès de vous.
    Je me suis donc rendue au ministère où, après l’exposé de mon infortune, on me remit un secours immédiat de 100 f. me permettant de prendre un logement et de parer aux premières nécessités. Nous avons donc employé cet argent à travers un modeste local de 250 francs mais sans meuble ayant sacrifié jusqu’à ma literie sauf un matelas, nous n’avons donc que l’abri.
    En ce moment, ma fille sollicite un emploi auprès de monsieur le ministre du commerce et de l’agriculture, postes plus sûrs que ceux du commerce où elle avait été employée, mais moi, dans l’impossibilité matérielle de travailler pour gagner ma vie, ces secousses renouvelées ayant altéré ma santé.
    J’implorerai donc, Monsieur le Ministre, de votre haute bienveillance, une légère pension qui soulagerait ma fille dans sa tâche de subvenir aux besoins de toutes deux si toutefois, qu’ayant de suite une occupation, elle pourrait le faire.
    Confiante en votre sollicitude, j’ai espéré, Monsieur le Ministre, que vous accueillerez favorablement ma requête et que vous donnerez une suite selon mes désirs.
    Croyez à toute ma reconnaissance et daignez agréer les sentiments de mon profond respect.

Vve A. Boye 51 r Censier

 

 

courrier du 26 janvier 1906

      Monsieur le Ministre des Colonies

      Monsieur le Ministre,
   Je viens faire appel à votre bienveillance vous priant de vouloir bien vous intéresser à ma pénible situation.
   Les détails, aussi bien que les renseignements que je pourrais vous donner sont déjà connus au ministère des colonies qui lors du dernier sinistre de la Martinique avait agréé ma demande d’un secours.
   Cependant, Monsieur le Ministre, sans trop abuser de vos instants, il serait peut-être urgent que je vous informe de nouveau que je suis veuve sans nulle ressource, ayant été incessamment victime des catastrophes qui ont frappé notre chère Martinique. Je suis en ce moment souffrante, ne pouvant pour l’instant travailler. Depuis un an, j’habite Tours à la charge de mon gendre dont la famille augmente, qui ne peut rien pour moi ce qui me cause le plus profond chagrin. Je me vois donc, Monsieur le Ministre, en face cette pénible situation, contrainte de nouveau à frapper à la porte de votre cœur si compatissant (dit-on) pour ceux des colonies dont vous êtes le représentant qui sans doute prendra en considération la demande que je vous adresse d’un secours qui me permettrait de pourvoir aux premières nécessités que réclame ma triste situation.
    Dans cette espérance, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, mes sincères salutations.

Vve A. Boye
au 61 bis rue St Paul
Tours
Indre et Loir

26 janvier 1906

 

 

retour accueil
haut de page